ARK NETWORK reference.ch · populus.ch    
 

  PARS EN GUERRE CONTRE LE MONDE 

 Home  | Livre d'Or  | Album-Photo  | Contact  

 

 

Rubriques

Liens


L'idéologie des maîtres du monde

Les Maîtres du Monde ont en commun des valeurs et des principes fondamentaux qui sont le ciment de leur unité, et leur dénominateur commun. L'adhésion à ces principes est obligatoire pour être admis dans le cercle des Maîtres du Monde et de leurs organisations les plus centrales: Groupe de Bilderberg, Skull & Bones, ou Illuminati. Ces principes étaient ceux des Nazis comme ils sont ceux de leurs héritiers: les idéologues du nouvel ordre mondial. 
 
 
 
 
Les principes-clé des Maîtres du Monde 
 
1 - La fin justifie les moyens 
 
2 - Le fort doit dominer le faible. Le fort est fait pour être un prédateur, et le faible une proie. 
 
3 - L'élimination des faibles est conforme au principe de la sélection naturelle (cf. Darwin) 
 
4 - La vie de tous les individus n'a pas la même valeur. Ceux qui ont une valeur négative peuvent être éliminés, dans l'intérêt supérieur de l'ensemble. 
 
5 - Le monde doit être gouverné par une élite. 
 
 
 
 
 
 
Les prédateurs - extraits du livre "Les nouveaux Maîtres du Monde" de Jean Ziegler 
 
 
"Au coeur du marché globalisé, le prédateur. Banquier, haut responsable de société transnationale, opérateur du commerce mondial. Il accumule l'argent, détruit l'état, dévaste la nature et les êtres humains, et pourrit par la corruption les agents dont il s'assure les services au sein des peuples qu'il domine. 
 
Pour les forts, mais aussi pour les faibles qui rêvent de les rejoindre, le bonheur réside désormais dans la solitaire jouissance d'une richesse gagnée par l'écrasement d'autrui, par la manipulation boursière, par la fusion d'entreprises toujours plus gigantesques et l'accumulation accélérée de plus-values d'origines les plus diverses. Dernière invention en date de la société de la cupidité: breveter le vivant. 
 
La rationalité marchande ravage les consciences, elle aliène l'homme et détourne la multitude d'un destin librement débattu, démocratiquement choisi. La logique de la marchandise étouffe la liberté irréductible, imprévisible, à jamais énigmatique de l'individu. L'être humain est réduit à sa pure fonctionnalité marchande." 
 
 
 
 
 
 
 
Le nouvel esclavage, vu par les Maîtres du Monde 
 
extrait de "1984" de George Orwell
 
 
"Nous ne cherchons pas le pouvoir en vue de nos propres fins, mais pour le bien de la majorité tel que nous le définissons. Les hommes, ces créatures frêles et lâches, ne peuvent endurer la liberté ni faire face à la vérité. Ils doivent être dirigés par ceux qui sont plus forts qu'eux. L'espèce humaine a le choix entre la liberté et le bonheur, or le bonheur vaut mieux. 
 
Le bien des autres ne nous intéresse pas, nous ne recherchons que le pouvoir, le pur pouvoir. Les nazis et les communistes se rapprochent beaucoup de nous par leurs méthodes, mais ils n'eurent jamais le courage de reconnaître leurs propres motifs. Ils prétendaient s'être emparés du pouvoir pour une période limitée; passé le point critique, il y aurait un paradis où les hommes seraient libres et égaux. Nous ne sommes pas ainsi, nous savons que jamais personne ne s'empare du pouvoir avec l'intention d'y renoncer. On n'établit pas une dictature pour sauvegarder une révolution. On fait une révolution pour établir une dictature. La persécution a pour objet la persécution. La torture a pour objet la torture. Le pouvoir a pour objet le pouvoir. 
 
L'esclavage c'est la liberté. Seul, libre, l'être humain est toujours vaincu. Mais s'il renonce à son identité, s'il se soumet entièrement et totalement, il se fond dans le pouvoir collectif, il est alors tout-puissant et immortel. 
 
Ce pouvoir est aussi le pouvoir sur d'autres êtres humains, sur les corps mais surtout sur les esprits. Le pouvoir sur la matière n'est pas important, notre maîtrise de la matière est déjà absolue. Ce qui importe c'est de commander à l'esprit. La réalité est à l'intérieur du crâne... Le réel pouvoir, le pouvoir pour lequel nous devons lutter jour et nuit, est le pouvoir non sur les choses, mais sur les hommes. Comment assure-t-on le pouvoir sur un autre? En le faisant souffrir. L'obéissance ne suffit pas. Comment, s'il ne souffre pas, peut-on être certain qu'il obéit, non à sa volonté, mais à la nôtre? 
 
 
 
 
Le pouvoir est d'infliger des souffrances et des humiliations. Le pouvoir est de déchirer l'esprit humain en morceaux que l'on rassemble ensuite sous de nouvelles formes que l'on a choisies. Commencez-vous à voir quel sorte de monde nous créons? Un monde de crainte, de trahison, de tourment. Un monde d'écraseurs et d'écrasés, un monde qui au fur et à mesure qu'il s'affinera deviendra plus impitoyable. Le progrès dans notre monde sera le progrès vers plus de souffrance. Notre civilisation est fondée sur la haine; il n'y aura pas d'autres émotions que la crainte, la rage, le triomphe et l'humiliation. Nous détruirons tout le reste. 
 
Nous avons coupé les liens entre l'enfant et les parents, entre l'homme et l'homme, entre l'homme et la femme. Mais plus tard, il n'y aura ni femme ni ami. Les enfants seront à leur naissance enlevés aux mères, comme on enlève leurs oeufs aux poules. La procréation sera une formalité annuelle, comme le renouvellement de la carte d'alimentation. Il n'y aura plus de loyauté que pour le pouvoir. Tous les plaisirs de l'émulation seront détruits remplacés par l'ivresse toujours croissante du pouvoir, qui s'affinera de plus en plus. Il y aura à chaque instant, le frisson de la victoire, la sensation de piétiner un ennemi impuissant... Autant qu'un monde de triomphe ce sera un monde de terreur... Nous commanderons à la vie à tous ses niveaux. 
 
Vous imaginez qu'il y a quelque chose qui s'appelle la nature humaine qui sera outragée par ce que nous faisons et se retournera contre nous. Mais nous créons la nature humaine. L'homme est infiniment malléable. 
 
Tel est le monde que nous préparons. Un monde où les victoires succèderont aux victoires et les triomphes aux triomphes, un monde d'éternelle pression, toujours renouvelée, sur la fibre de la puissance. Vous commencez à réaliser ce que sera ce monde. À la fin vous ferez plus que le comprendre, vous l'accepterez, vous l'accueillerez avec joie, vous en demanderez votre part en idolâtrant vos propres bourreaux." 
 
Délocalisations et Mondialisation 
 
La mondialisation libérale consiste principalement en la suppression de toute entrave à la circulation des marchandises et des capitaux, rendant possible les délocalisations, les chantages à l'emploi, et les profits sans précédent des multinationales. Au risque de causer la désindustrialisation et le déclin géopolitique des pays occidentaux... 
 
Faire baisser le "coût du travail" 
 
Pour maximiser le profit des entreprises, la solution la plus facile et la plus efficace est de faire baisser le "coût du travail". Il existe d'autres moyens pour accroître les profits (l'innovation, la recherche et développement...), mais leurs résultats sont incertains et ne peuvent être obtenus qu'à long-terme, alors que la réduction du "coût du travail" permet de générer une augmentation des profits de façon certaine et immédiate. 
 
La baisse du "coût du travail" est obtenue en réduisant les salaires et les charges sociales, et en augmentant le temps de travail. 
 
Et pour que les salariés acceptent des conditions moins avantageuses, il est nécessaire d'augmenter la concurrence sur le marché du travail. 
 
 
 
Le but central de la mondialisation: augmenter la concurrence sur le marché du travail 
 
Les délocalisations et les chantages à l'emploi ont révélé l'objectif principal de la "mondialisation": instituer un nouvel esclavage en mettant en concurrence directe les salariés de tous les pays, grâce à la suppression des barrières douanières et des restrictions à la circulation des capitaux. 
 
A travers une série d'accords internationaux (établis depuis 1995 dans le cadre de l'OMC), cette déréglementation a permis aux multinationales de dissocier totalement le lieu de production du lieu de vente, en délocalisant les usines en Chine pour vendre les produits en Amérique du Nord ou en Europe, là où se trouvaient les consommateurs et le pouvoir d'achat. 
 
Au début, les délocalisations ne concernaient que les emplois industriels. Aujourd'hui, elles touchent tous les secteurs, y compris le tertiaire (comptabilité, services informatiques, call-centers...) la haute technologie, ou la recherche et développement. 
 
Les délocalisations continueront tant que les entreprises auront le moindre profit à y gagner, c'est à dire tant que le salarié européen ou nord-américain n'aura pas accepté les mêmes conditions que le salarié chinois, en travaillant 70 heures par semaine, 6 jours sur 7, avec une semaine de vacances par an, sans protection sociale, le tout pour un salaire de moins de 150 euros par mois.  
 
Certains espèrent qu'avec le temps, un équilibre s'établira autour d'une moyenne entre les niveaux de salaires des pays émergents et ceux des pays occidentaux. Mais cet espoir est illusoire tant que l'absence de démocratie dans les pays émergents empêche toute revendication sociale pour l'amélioration des salaires et des conditions de travail. De même, tant que la surpopulation assure une surabondance de main d'oeuvre disponible, l'alignement des conditions de travail et des salaires ne peut se faire que par le bas.  
 
Cette baisse massive et durable du coût du travail pour les entreprises rend moins utiles les investissements dans la robotisation des moyens de production, les esclaves coûtant encore moins cher que les robots. Ainsi, les usines implantées en Europe de l'Est ou en Chine ressemblent aux usines des années 70, avec un retour au travail à la chaine des ouvriers.  
 
 
 
Paupérisation et enrichissement 
 
La paupérisation des consommateurs occidentaux pourrait sembler être un mauvais calcul de la part des multinationales, car au bout du compte, la baisse des revenus entraînera l'effondrement de la consommation. Mais en réalité, dans les prévisions des multinationales, la consommation globale ne sera pas affectée. Tout d'abord parce que cet appauvrissement ne concerne que les classes moyennes des pays occidentaux. Et cette baisse est compensée par un fantastique enrichissement sans précédent des "classes supérieures" qui profitent à plein du "libéralisme". Ces 10 dernières années, pendant que les classes moyennes s'appauvrissaient, le revenu des 1es plus riches n'a jamais autant augmenté. Ce que les uns ont perdu, les autres l'ont gagné, selon le principe bien connu des vases communicants.  
 
Par ailleurs, la baisse de la consommation des classes moyennes en Occident est compensée par un accroissement massif du nombre de consommateurs dans les pays émergents. Même si les revenus y sont faibles, cette faiblesse est compensée par le nombre (la population additionnée de l'Inde et la Chine est de 2,2 milliards d'habitants). 
 
 
 
Le prix écologique de la mondialisation 
 
L'intensification de la circulation des marchandises d'un continent à l'autre entre les lieux de fabrication, d'assemblage et de vente se fait au prix d'un accroissement considérable des transports (par bateaux, avions, camions) et donc de la pollution au CO2. Une pollution également accrue par l'entrée des pays émergents dans l'âge industriel et la "société de consommation", avec la généralisation de la voiture et du mode de vie occidental polluant. 
 
Outre la pollution globale au CO2, les pays émergents payent au prix fort les conséquences écologiques de leur croissance économique effrénée. Les pollutions causées par les accidents industriels se multiplient en Chine, où les habitants des villes portent souvent des masques, protection dérisoire contre une pollution de l'air qui tue 400.000 chinois chaque année.  
 
 
 
Une concurrence déséquilibrée 
 
La concurrence de la Chine est déloyale car elle repose sur une sous-évaluation de la monnaie chinoise qui réduit artificiellement les prix à l'exportation et le coût du travail pour les multinationales occidentales. Par ailleurs, la Chine n'étant pas une démocratie, les salariés chinois ne peuvent faire grève, manifester, ou créer des partis politiques pour défendre leurs intérêts. Le "libre-jeu du marché" (notion centrale du dogme libéral) ne s'applique pas au marché du travail chinois.  
 
 
 
 
Epuisement et dépression collective des citoyens occidentaux 
 
Pendant que la Chine faisait des efforts massifs et continus pour l'éducation de sa population et utilisait l'argent public de façon optimale pour développer ses infrastructures et son industrie, les dirigeants des pays occidentaux comme les Etats-Unis et la France se sont ingéniés à abrutir leur population (pour la rendre plus facilement manipulable), à affaiblir les énergies individuelles, à saboter l'éducation et les services publics (pour justifier ensuite leur privatisation), et à dilapider et détourner l'argent public. 
 
Au moment où les citoyens devraient redoubler d'imagination et de créativité pour relever le "défi de la mondialisation", ils sont épuisés, déprimés, vidés de leur énergie par leurs dirigeants qui n'ont cessé de les vampiriser et de les brimer (au nom de la "tolérance zéro"). 
 
L'avantage majeur dont disposait l'Occident jusqu'à présent étant son avance dans les industries technologiques et culturelles. L'épuisement des énergies, l'abêtisation, et une société de plus en plus étouffante et répressive ont affaibli les capacités d'innovation et réduit les atouts des pays occidentaux, en voie d'être rattrapés puis dépassés par la Chine, l'Inde, et d'autres pays émergents. 
 
 
 
Désindustrialisation et déclin de l'occident 
 
Les délocalisations représentent un danger stratégique pour les pays occidentaux, en particulier pour les pays européens. L'affaiblissement des secteurs industriels entraîne à sa périphérie celui des "services à l'industrie", de la recherche et développement, et finalement des sièges sociaux qui tendront à se rapprocher des nouveaux centres de production et de consommation. Bientôt le savoir-faire ainsi que la capacité d'initiative seront perdus dans un ensemble de secteurs dont certains sont essentiels pour le rang que ces pays souhaitent occuper dans le monde. La puissance géopolitique et militaire repose sur la puissance économique et technologique. Une fois appauvris et désindustrialisés, les pays occidentaux devront renoncer à leur leadership mondial, au bénéfice des actuels "pays émergents", au premier rang desquels se trouvent la Chine et l'Inde. 
 
Les Etats-Unis et surtout l'Europe de l'Ouest sont en voie de désindustrialisation (d'où la stagnation du PNB européen, avec une croissance inférieure à 2ar an contre 12 à 14our la Chine). Depuis 10 ans, les capitaux occidentaux se sont investis massivement en Chine, avec pour conséquence des infrastructures et un appareil productif vieillissant dans les pays occidentaux où les investissements ont manqué. Les villes et les usines des pays émergents sont souvent plus modernes que dans les pays européens qui sont désormais en voie de sous-développement, tandis que les anciens "pays en voie de développement" sont en train de devenir les pays riches des prochaines décennies. Bientôt, les rôles seront inversés, et les citoyens européens réduits à la misère deviendront les esclaves qui fabriqueront à bas coût les produits consommés en Chine. 
 
L'ironie du sort, c'est que ce sont les "forces vives" du capitalisme (les entreprises) qui sont en train de transformer la Chine en superpuissance, alors que c'est la dernière grande dictature communiste de la planète. 
 
 
 
Car la Chine est toujours officiellement un pays communiste, et ses dirigeants ont toujours affirmé que la phase actuelle n'était qu'un moyen transitoire pour parvenir à la victoire du "socialisme". 
 
Les dirigeants chinois ont parfaitement mis en pratique la stratégie des arts martiaux et de la sagesse orientale: utiliser la force de l'adversaire contre lui-même. 
 
La Chine a analysé méthodiquement les faiblesses de l'Occident, en identifiant parfaitement le point faible principal, à savoir l'incroyable cupidité des multinationales et le dévoiement du pouvoir politique par les élites économiques. 
 
 
 
Consommateurs irresponsables 
 
Les délocalisations n'auraient pas été possibles sans l'inconscience et l'irresponsabilité des consommateurs qui achètent des produits sans se soucier des conditions de production et de leurs conséquences.  
 
Les citoyens ont encore le moyen de mettre en échec les délocalisations en boycottant totalement les productions délocalisées, ce qui implique une grève quasi totale de la consommation de produits manufacturés (produits électroniques et informatiques, vètements, chaussures, articles de sport, de jouets, etc). Le lieu de fabrication est indiqué sur les produits. La mention "made in PRC" (signifiant "Popular Republic of China") est souvent utilisée pour dissimuler l'origine chinoise au consommateur non-averti.  
 
Pour être efficace, cette grève doit avoir lieu tant que les consommateurs occidentaux représentent encore la part majoritaire du chiffre d'affaire des multinationales. 
 
 
 
Restaurer les barrières douanières 
 
Chaque pays est dans une situation différente, avec une culture et une histoire différentes. Il est donc normal que les systèmes sociaux soient différents. De même qu'une cellule est pourvue d'une membrane pour maintenir les conditions nécessaires à son milieu intérieur, la seule manière pour un pays de sauvegarder son système social est d'établir des barrières douanières, pour équilibrer les conditions économiques différentes des pays d'où proviennent les produits importés. 
 
Il n'existe donc que deux solutions pour mettre fin aux délocalisations et au déclin industriel des pays occidentaux: l'alignement des conditions sociales sur celles en vigueur dans les pays émergents, ou bien, le rétablissement des barrières douanières proportionnellement aux différences de salaires, de droits sociaux, et de législation environnementale. 
 
 
 
Dernier moment pour agir 
 
La période actuelle est le dernier moment pour agir. Il n'y aura en effet plus de retour en arrière possible lorsque les machines, les capitaux, et le savoir-faire seront partis ailleurs. Il sera également trop tard lorsque la capacité d'action des états (et donc des citoyens) aura été totalement neutralisée par les accords multilatéraux, les traités européens, et surtout, par l'effet conjugué de l'endettement (dont le remboursement représente déjà le quart des dépenses de l'état en France) et de la réduction des recettes de l'état, du fait de la désindustrialisation et de l'appauvrissement des salariés. 
 
 
Un cercle d'influence atlantiste en France : La Fondation Saint-Simon. 
 
Issue des milieux anti-communistes de la Guerre froide, la Fondation Saint-Simon a discrètement rassemblé en France, dans les années 80 et 90, des personnalités politiques, économiques, culturelles et médiatiques. Entre autres membres éminents : Pierre Rosanvallon, Alain Minc, Francis Mer, Serge July, Laurent Joffrin, Luc Ferry, Alain Finkielkraut, ou encore Christine Ockrent. Membre du Club de La Haye, un réseau international de think-tanks animé par la CIA, la Fondation Saint-Simon a éclipsé les intellectuels de la gauche non-atlantiste et imposé une forme de pensée unique en France. 
 
De 1982 à 1999, la Fondation Saint-Simon exerça un véritable magistère sur la vie intellectuelle et médiatique française. Dans le prolongement de la « Troisième voie » chère à Raymond Barre, Jacques Delors ou Michel Rocard, elle rassembla une centaine de personnalités issues des cercles libéraux et sociaux-démocrates et développa un discours « ni de gauche, ni de droite » [1], qualifié par ses détracteurs de « pensée unique ». 
 
Son fondateur et premier président, l’historien François Furet, ne faisait pas mystère d’avoir noué des contacts avec la CIA après avoir rompu avec le Parti communiste. De plus, il se présentait comme le continuateur de l’œuvre de Raymond Aron, un intellectuel anti-communiste qui anima le Congrès pour la liberté de la culture, une vaste opération de la CIA pour manipuler les intellectuels ouest-européens et les enrôler dans la Guerre froide. Malgré ces indices, les liens éventuels de la Fondation Saint-Simon avec les services états-uniens ne furent jamais discutés. Notre enquête les a mis à jour. 
 
La réactivation des réseaux de la « Troisième voie » anti-totalitaire 
Pour comprendre comment la Fondation Saint-Simon a été créée, en 1982, il importe de se remémorer les efforts entrepris depuis la dissolution du Congrès pour la liberté de la culture, en 1975, pour faire vivre le courant intellectuel de la « Troisième voie ». 
 
Dès la fin des années 70, les intellectuels libéraux et les sociaux-démocrates anti-communistes renouvellent leur alliance afin de lutter contre le Programme commun présenté par François Mitterrand. Ainsi, en 1978, Raymond Aron s’entoure de Jean-Claude Casanova [2] Alain Besançon [3] et Kostas Papaioannou pour créer Commentaire, une revue dont la problématique centrale est l’analyse critique du phénomène totalitaire [4]. Elle tire son nom de Commentary la revue mensuelle de l’American Jewish Committee et en inclut des rédacteurs dans son propre comité de rédaction. 
 
Dans le sillage de Contrepoint, revue de Georges Liébert et Patrick Devedjan et de Preuves, publication quasi-officielle du Congrès pour la liberté de la culture, Commentaire rassemble des intellectuels et hommes politiques anti-communistes et pro-états-uniens. Ses réseaux s’étendent de l’IEP [5] (Jean-Claude Casanova, Michel Crozier, Alain Lancelot) à la Sorbonne (Raymond Boudon, Pierre Chaunu), en passant par l’EHESS [6] où François Furet mène une véritable politique de recrutement politique (il fera entrer Pierre Rosanvallon, pourtant diplômé d’une école de commerce, HEC). 
 
Le comité de direction comprend deux aroniens, Pierre Manent, assistant de Raymond Aron au Collège de France et Marc Fumaroli, professeur à la Sorbonne puis au Collège de France. Le comité de rédaction est présidé par Raymond Aron et comprend des personnalités telles que Annie Kriegel, Alain Lancelot, Jean-François Revel, Georges Suffert... 
 
Suivant la trace de Raymond Aron, les intellectuels du Congrès pour la liberté de la culture sont présents dans Commentaire : Manès-Sperber, Georges Vedel, le juriste du Club Jean Moulin, Michel Crozier, le sociologue officiel des planificateurs. L’ancien chef de Preuves, François Bondy, participe au comité de rédaction. De plus, le parrainage états-unien est assuré par l’intermédiaire de figures du Congrès pour la liberté de la culture, Irving Kristol [7] et Norman Podhoretz [8]. 
 
Dans une période de pacification relative des rapports Est/Ouest (ce moment prend fin avec la présidence Reagan), la revue constitue le maillon intermédiaire entre le Congrès pour la liberté de la culture et la Fondation Saint-Simon. Résolument pro-états-uniens, les membres de Commentaire contribuent à diffuser les auteurs libéraux américains tels que Allan Bloom, professeur de philosophie politique à Chicago qui annonce, dans L’Âme désarmée, la décadence en pointant du doigt les mouvements étudiants, et Francis Fukuyama, célèbre théoricien de la « fin de l’Histoire ». Dans la logique du réseau du Congrès pour la liberté de la culture, Commentaire consacre un dossier à l’œuvre de Friedrich von Hayek, le fondateur de l’ultra-libérale Société du Mont Pèlerin, un think tank qui contribue à la victoire de Margaret Thatcher en 1979. 
 
La revue Commentaire, constituée des réseaux construits par Raymond Aron durant les deux premières décennies de la Guerre froide, regroupe des intellectuels anticommunistes de la première génération - les membres du Congrès pour la liberté de la culture, les élites des clubs de la « Troisième voie » (club Jean Moulin, club Citoyens 60) - et recrute des jeunes universitaires comme Pierre Rosanvallon ou François Furet. La revue a ainsi permis aux aînés de transmettre un capital de relations sociales à la nouvelle génération des intellectuels pro-états-uniens qui, en créant la Fondation Saint-Simon en 1982, reformulent l’idéal politique des pionniers de la « Troisième voie » (Pierre Mendès-France, Jacques Delors). 
 
À la fin des années soixante-dix, l’école aronienne (Contrepoint, Preuves et Commentaire) est « concurencée » par la création d’un nouveau pôle de réflexion dit « réformiste » composé de jeunes intellectuels en quête de reconnaissance académique. En 1980, Pierre Nora, le patron des éditions Gallimard, et Marcel Gauchet, l’adversaire de Michel Foucault, lancent la revue Le Débat qui va constituer une tribune et un tremplin pour la jeunes génération incarnée par Alain Finkielkraut, Alain Minc, Gilles Lipovetsky, Luc Ferry... Cette équipe, qui plaide pour une « nouvelle gauche », libérale et sociale, rejoindra la Fondation Saint-Simon, en 1982. 
 
Les fondateurs 
La mise en place du réseau saint-simonien est le résultat de la rencontre entre deux intellectuels majeurs du courant anti-totalitaire, l’historien François Furet et le porte-parole de la CFDT Pierre Rosanvallon, et deux personnalités du monde économique, l’ultra-catholique Roger Fauroux et l’influent conseiller du patronat français Alain Minc. 
 
François FuretL’itinéraire politique de François Furet met en perspective les liens unissant les saint-simoniens et les néo-conservateurs états-uniens qui, par l’intermédiaire des fondations, financent les carrières de nombreux intellectuels français. François Furet, soutenu par l’ultra-conservatrice fondation Olin [9] lance un programme de démantèlement de l’historiographie marxiste et parallèlement dénonce l’alliance avec les communistes en créant, avec le soutien états-unien, un think tank destiné à combattre le Programme commun.  
Militant communiste jusqu’en 1956 [10], il obtient l’agrégation d’histoire en 1954 en se faisant le défenseur des thèses du marxisme orthodoxe. Il entre au CNRS en 1956, puis à l’EHESS ; après sa rupture avec le PCF, il tente de fabriquer une historiographie tendant à réfuter la doctrine marxiste. Il analyse la Révolution française comme un phénomène achevé avec la IIIe République et entreprend un travail de dénonciation du « totalitarisme » communiste [11]. En quittant le PCF, François Furet devient un libéral intransigeant dans la lignée de Raymond Aron. Confirmant cette filiation intellectuelle, il crée avec Luc Ferry l’Institut Raymond Aron, qu’il dirige jusqu’en 1992. Président de l’EHESS de 1977 à 85, il part à Chicago en 1982 ; la même année, il crée la Fondation Saint-Simon. Au moment de la commémoration du bicentenaire de la Révolution française, la Fondation Olin lui verse 470 000 dollars [12] afin de financer son programme de recherche sur les révolutions américaine et française. En 1995, il publie Le Passé d’une illusion, ouvrage qui lui permet de revenir sur la fascination des intellectuels pour le marxisme et d’ériger le communisme comme une forme de totalitarisme équivalente au nazisme. Anti-mitterrandien radical et agent des néo-conservateurs états-uniens, François Furet a construit une œuvre intellectuelle conforme à la volonté de ses mécènes. 
 
Pierre RosanvallonSon protégé, Pierre Rosanvallon, appartient à la jeune génération des « anti-totalitaires » formés dans les cercles aroniens de Commentaire.  
Pierre Rosanvallon est diplômé d’HEC. Ex-dirigeant des JEC (Jeunesses étudiantes chrétiennes), il entre à la CFDT et lance, avec Edmond Maire et Marcel Gonin, la revue CFDT-aujourd’hui. Très proche de Jacques Delors avec qui il crée le Centre Travail et Société, il participe à de nombreuses expériences de la « Troisième voie ». Il écrit dans Esprit, Le Nouvel observateur, Commentaire (dés 1978). Grâce à François Furet, il entre à l’EHESS et devient responsable des études politiques jusqu’à la consécration du Collège de France. Auteur d’essai à prétention sociologique et historique [13], Pierre Rosanvallon fut « l’éminence grise » d’Edmond Maire à la CFDT, puis le conseiller de Jacques Delors. Il détient une place clé dans les réseaux saint-simoniens ; il représente la Fondation au comité directeur du Club de la Haye. 
 
Alain MincAlain Minc, proche allié de Roger Fauroux, est le trésorier de la Fondation. Inspecteur des finances, major de sa promotion à l’ENA, son ami Fauroux lui offre le poste de directeur financier de Saint Gobain. Remercié après les pertes occasionnées par les opérations manquées de rachat de Bull et de la Générale des eaux, Alain Minc entre dans le groupe Carlo de Benedetti où ses échecs, comme vice-président de Cerus, ne l’empêchent pas d’empocher sept millions d’indemnités. Fort de ces expériences, il crée Alain Minc Conseil [14]. Parallèlement, il publie de nombreux livres dont un lui vaudra condamnation pour plagiat. Avec le soutien de grands patrons, il organise la recapitalisation du quotidien Le Monde, en 1994, et en préside depuis le Conseil de surveillance. Il coordonne l’écriture du rapport La France de l’an 2000 (Commissariat au Plan), commandé par Édouard Balladur dont il est l’un des soutiens les plus influents. 
 
Roger FaurouxAmi et conseiller des patrons, Alain Minc a su tirer partie de ses relations et a joué un rôle de recruteur, notamment dans les milieux patronaux. 
 
Le président de la Fondation, Roger Fauroux, est une personnalité au centre de réseaux multiples et étendus. Il est d’abord considéré comme un patron, il fut le Pdg de Saint-Gobain où il repéra son ami Alain Minc. Politiquement, il appartient à la « nouvelle gauche » incarnée par Raymond Barre et Michel Rocard. Ce dernier le désigna, dans son gouvernement, ministre de l’industrie. Il fut directeur de l’ENA. Il conseilla le Cardinal Lustiger et fit ainsi réaliser à l’Église catholique des profits spéculatifs inespérés. Patron ultra-catholique, Roger Fauroux a assuré une partie conséquente du financement de la Fondation en mettant à contribution des entreprises comme Saint-Gobain ou MK2 Production. 
 
La convergence des intellectuels et des patrons 
La Fondation Saint-Simon revendique son rôle de liaison entre les intellectuels de la « deuxième gauche » et les patrons de nombreuses entreprises publiques et privées. Cette vocation se traduit par la présence de François Furet et Pierre Rosanvallon au conseil d’administration de Saint-Gobain. Une telle alliance entre les technocrates de la fonction publique ou de l’entreprise et les élites culturelles donne une forme nouvelle au « rêve politique » de la « Troisième voie » incarnée dans les années 60 par le club Jean Moulin [15]. 
 
Les saint-simoniens sont des hauts fonctionnaires de la planification (Pierre-Yves Cossé, commissaire général au Plan), des journalistes médiatiques (Françoise Giroud de L’Express, Jean Daniel et Jacques Julliard du Nouvel observateur, Franz-Olivier Giesbert du Figaro, Serge July et Laurent Joffrin de Libération), des stars de la télévision (Anne Sinclair, Christine Ockrent), des philosophes (Alain Finkielkraut, Edgar Morin, Luc Ferry), des patrons d’entreprise et des banquiers (Francis Mer, directeur général d’Usinor, Jean-Claude Trichet, gouverneur de la banque de France), des éditeurs (Pierre Nora des éditions Gallimard, Yves Sabouret d’Hachette) et bien sûr des politiques (Martine Aubry, Robert Badinter, Jean-Paul Huchon, Bernard Kouchner), etc. 
 
Jouant sur la connivence des élites, les membres de la Fondation Saint-Simon sont en mesure d’échanger des services symboliques et matériels. Les patrons viennent discuter avec les philosophes en vogue et financent les activités de la Fondation, dont les fonds sont exclusivement privés. Les membres donnent une cotisation symbolique (500 francs en 1997) ; la Caisse des dépôts, Suez, Publicis, la SEMA, le Crédit local de France, la banque Wormser, Saint-Gobain, BSN Gervais-Danone, MK2 productions, Cap Gemini Sogeti [16] financent les déjeuners et publications de la Fondation Saint-Simon (soit un budget de 2 500 000 francs). 
 
La collaboration financière entre les entreprises et les intellectuels permet à Pierre Rosanvallon, proche de Jean Peyrelevade (un des auteurs des notes vertes de la Fondation avec d’autres patrons comme Raymond Lévy, Jean-Louis Beffa, Michel Bon), de créer La République des idées grâce aux contacts auprès de grandes entreprises comme Lafarge, Altadis, les AGF, EDF, Air France. 
 
La face cachée de la Fondation Saint-Simon 
En réalité, dès sa création et probablement à l’insu de la plupart de ses membres, la Fondation Saint-Simon est organiquement articulée aux réseaux atlantistes. Elle adhère en effet à un réseau de fondations animé par la CIA, puis indirectement par la National Endowment for Democracy : le Club de La Haye. 
 
En 1964, la Fondation Ford, jouant le rôle de bras philanthropique de la CIA, avait organisé à Berlin un symposium en vue de la création en Europe de fondations à l’américaine. Quatre conférences internationales plus tard, les premières fondations européennes furent invitées, en 1969, à un séminaire de travail, sous les auspices des fondations Ford et Rockfeller, à la villa Serbeloni de Bellagio (Italie), à l’issue duquel fut créé un groupe de contact permanent, le Club de La Haye. 
 
Depuis lors, le Club organise plusieurs rencontres annuelles. La première est consacrée à la recherche de financement et les suivantes à l’étude d’un ou deux thèmes de propagande qu’il appartiendra à chaque fondation membre de populariser dans son pays. 
 
En 1982, la Fondation Saint-Simon à peine créée, reçoit le Club de La Haye à Paris. Deux thèmes sont abordés : le chômage et la société multiculturelle. Les réunions suivantes auront pour objet : le sens du travail (Bunnik, 1983) ; favoriser l’excellence à l’université (Londres, 1983) ; l’émergence de la société multiculturelle en Europe (Bruxelles, 1984) ; l’excellence contre l’égalitarisme dans les sociétés multiculturelles (Jérusalem, 1986) ; les implications de la croissance de la population mondiale (Athènes, 1991) ; la société civile (Séville, 1992) ; le financement de l’enseignement supérieure et de la recherche (Londres 1993) ; etc. On devine là la matrice de la rhétorique saint-simonienne où la société multiculturelle se substitue à la laïcité et où l’équité remplace l’égalité, pour ne citer que quelques exemples. 
 
À chaque rencontre du Club de La Haye, les fondations membres envoient un délégué. La Fondation Saint-Simon est représentée, généralement par son secrétaire général, Pierre Rosanvallon. En outre, deux personnalités « extérieures » participent aux débats : James A. Joseph, président du Conseil des fondations des États-Unis et administrateur de la National Endowment for Democracy, et Yehuda Elkana, représentant George Soros. 
 
Les grèves de 1995 : le moment de vérité 
L’accès aux médias, presse écrite et audiovisuelle, constitue une autre facette du pouvoir des saint-simoniens. Après l’échec de la candidature d’Édouard Balladur à la présidence de la République, les grèves de 1995 posent à ce titre un véritable défi pour la Fondation Saint-Simon qui devient l’instrument de communication de la CFDT [17]. Le projet Juppé de réforme du système des retraites provoque une vague de manifestations ; Nicole Notat, la secrétaire générale du syndicat, décide d’appuyer le projet en apportant quelques critiques (projet Notat). Afin de soutenir la stratégie de la CFDT, des intellectuels répondent à l’appel des deux principaux animateurs d’Esprit, Joël Roman et Olivier Mongin, qui lancent une pétition pour soutenir les propositions Notat [18]. 
 
Les membres d’Esprit contactent la Fondation Saint-Simon dont les principaux théoriciens considèrent globalement que la réforme Juppé est une « révolution » (Alain Minc) indispensable. Pierre Rosanvallon et Alain Minc mettent en place un plan de soutien médiatique des propositions Notat. La CFDT, dans ce dispositif, défend ses positions en mobilisant les intellectuels du syndicat dispersés, notamment, dans le réseau Esprit et dans le groupe des saint-simoniens. Les relais médiatiques sont, grâce à la Fondation, assurés [19]. 
 
Malgré ce plan d’action, qui présuppose des capitaux relationnels importants, les défenseurs de Notat, qui signent l’appel Réforme, se heurtent au mouvement, lancé par Pierre Bourdieu, de soutien aux grévistes. Le sociologue multiplie les initiatives (pétitions, soutien public aux grévistes de la gare de Lyon...) afin de rallier les opposants au projet Juppé. Sur les plateaux de télévision, où Alain Touraine fait office de porte-parole des partisans de la réforme, certains n’hésitent pas à pointer du doigt la Fondation Saint-Simon. 
 
Alain Touraine, normalien, débute sa carrière, après un passage à Harvard, en tant que « sociologue de gauche » en étudiant le travail des ouvriers des usines Renault. Ami et « rival » de Michel Crozier avec qui il crée la revue Sociologie du travail en 1959, Alain Touraine constitue un cas exemplaire d’intellectuel de la « Troisième voie » de gauche mais engagé sans nuance contre le communisme. Il est proche des planificateurs qui financent ses recherches par l’intermédiaire de l’Institut des sciences sociales du travail (ISST). Intellectuel engagé, il soutient le mouvement des étudiants en 1968 à Nanterre. Il est pourtant remercié l’année suivante au même titre que Michel Crozier qui, dans la lignée du maître Aron, s’est opposé sans nuance au « désordre » causée par la contestation. Durant les grèves de 1995, Alain Touraine est désigné officieusement porte-parole de la Fondation Saint-Simon. Ses contacts dans les médias lui permettent d’être l’invité omniprésent des débats politiques. 
 
Le plan de manipulation médiatique imaginé par Pierre Rosanvallon aboutit à un double échec qui va justifier la dissolution du groupe des saint-simoniens : d’une part, les réformes prônées par Juppé et Notat sont bloquées, ce qui constitue une défaite des cadres intellectuels de la CFDT, et d’autre part, la Fondation, en mobilisant ses troupes sur le champ médiatique, a perdu son anonymat. 
 
La dissolution du « temple de la pensée unique » 
Désignée comme le « temple de la pensée unique », la Fondation Saint-Simon est la cible de nombreuses critiques. Dès 1992, Régis Debray réunit les opposants à Balladur en créant le club Phare & Balises. Avec Emmanuel Todd et Alexandre Adler, il attire des chevènementistes et des chiraquiens. L’expérience se renouvelle par l’intermédiaire de la Fondation Marc Bloch qui deviendra la Fondation du 2 Mars (Philippe Cohen, journaliste à Marianne, Régis Debray, Pierre-André Taguieff...). En 1996, un « appel pour sortir de la pensée unique » rassemble des opposants à la Fondation Saint-Simon. Concrétisant cette alliance des membres d’ATTAC, d’AC !, des universitaires syndiqués (CGT, FSU) créent, en 1999, aux côtés de l’historien Jacques Kergoat, le club Copernic. 
 
La Fondation Saint-Simon, devenue trop visible, est dissoute en 1999 [20]. Certains saint-simoniens entrent dans le club En temps réel fondé par Zaki Laïdi et dirigé par Gilles Margerie (Directeur général adjoint du Crédit agricole) ; d’autres se tournent vers des clubs de réflexion réservés aux patrons, comme L’Institut de l’entreprise présidé par Michel Bon. La plupart des intellectuels de la Fondation intègrent La République des idées de Rosanvallon. 
 
La permanence des réseaux saint-simoniens 
En France, la Fondation Saint-Simon a permis la construction d’un réseau durable de relations et de soutien mutuel entre des élites culturelles, politiques et économiques. L’échec du soutien à la candidature Balladur à l’élection présidentielle de 1995 n’a pas pour autant disqualifié les membres de la Fondation comme le démontre la composition du gouvernement Raffarin dans lequel on trouve le philosophe Luc Ferry et le patron Francis Mer [21]. 
 
D’un point de vue diplomatique, la Fondation Saint-Simon, dans le sillage du Congrès pour la liberté de la culture, a permis de coordonner, pendant près de vingt ans, l’action des réseaux pro-états-uniens en France. L’ancrage néo-conservateur explique les orientations anti-communistes du début de la Fondation, au moment où l’administration Reagan redéfinit la politique étrangère des États-Unis, et les prises de positions libérales défendues après la chute de l’Union soviétique, notamment durant les évènements sociaux de 1995. 
 
Il est éventuellement légitime pour des responsables politiques et des intellectuels d’avoir choisi, au cours de la Guerre froide, de se joindre au camp atlantiste contre le totalitarisme stalinien. Mais cet engagement change de sens après l’effondrement de l’Union soviétique. Il appartient à ceux qui ont prolongé ce compagnonnage d’expliquer aujourd’hui le sens de leur choix. 
 
[1] Alain Minc, reformulant la rhétorique aronienne, parle d’une alliance entre « la gauche intelligente et la droite intelligente ». Laurent Vincent, « Les architectes du social-libéralisme », Le Monde diplomatique, septembre 1998. 
 
[2] Jean-Claude Casanova, ancien membre du cabinet de Raymond Barre, sera l’un des membres les plus influents de la Fondation Saint-Simon. Disciple de Raymond Aron, il importe la rhétorique néo-conservatrice en vulgarisant des auteurs comme Léo Strauss et Allan Bloom. 
 
[3] Alain Besançon est éditorialiste et administrateur de l’Institut d’histoire sociale (IHS). 
 
[4] Rémy Rieffel, La tribu des clercs, Les intellectuels sous la Cinquième République, Calmann-Lévy, 1993. 
 
[5] Institut d’études politiques de Paris, dit « Sciences-Po Paris ». 
 
[6] École des hautes études en sciences sociales. 
 
[7] Collaborateur de l’American Enterprise Institute où son salaire est financé par John M. Olin, Irving Kristol a dirigé Commentary de 1947 à 1952. Son fils William, actuel directeur du Weekly Standard, est un des théoriciens majeurs du néo-conservatisme. Il est à l’origine, avec Robert Kagan, du Project for a New American Century, le think tank électoral de George W. Bush installé dans les locaux de l’American Enterprise Institute. 
 
[8] Norman Podhoretz a dirigé Commentary de 1960 à 1965. Il présida, de 1981 à 1987, le Comité consultatif des nouvelles directions de l’Agence d’information des États-Unis (USIA) contrôlant notamment La Voix de l’Amérique. Il est aujourd’hui chercheur au Hudson Institute. Son épouse, Midge Decter dirigea le Committee on Present danger, puis avec Donald Rumsfeld, la Coalition for the Free World. Leur fils, John Podhoretz, est éditorialiste du New York Post. Leur gendre, Elliott Abrams, est aujourd’hui en charge du Proche-Orient au Conseil de sécurité nationale. 
 
[9] La Fondation Olin est créée en 1953 par l’industriel John Olin et finance, à partir de 1977, des carrières universitaires et politiques. Les fonds Olin ont ainsi permis le financement des activités de l’American Entrerprise Institute mené par Norman Podhoretz et Irving Kristol, deux anciens directeurs de Commentary. Le continuateur du philosophe Leo Strauss, Allan Bloom, auteur de The closing of the american mind, un des « classiques » de la littérature néo-conservatrice, a bénéficié du soutien de la fondation dont le bastion est l’université John M. Olin (Chicago). Par ailleurs, l’ultra-conservatrice Fondation Olin a contribué à former des membres de l’administration Reagan comme Murray Weidenbaum et Martin Feldstein. 
 
[10] Au PCF, il rencontre Emmanuel Le Roy-Ladurie, Alain Besançon, Annie Kriegel et Jacques Ozouf. 
 
[11] Ces deux entreprises intellectuelles sont intimement liées. Le travail historique de François Furet, compilé dans les deux tomes La Révolution, tend, par exemple à démontrer le caractère totalitaire de la Convention, régime de référence du Parti communiste français. François Furet en décrivant la Ière République comme un moment historique précurseur du totalitarisme contemporain, s’oppose aux historiographes marxistes et règle donc ses comptes avec les alliés d’hier. Il faut noter que ce programme ambitieux d’historien anti-communiste a été financé par la Fondation Olin. 
 
[12] Cf. Laurent Vincent, Les Architectes du social-libéralisme. 
 
[13] L’Age de l’autogestion, 1976 ; La Crise de l’État-providence, 1981 ; La République du centre, 1988 ; La Nouvelle question sociale : repenser l’État-providence, 1995... 
 
[14] En 1999, Alain Minc conseillait Philippe Jaffré (Elf), Louis Schweitzer (Renault), Jean-Louis Beffa (Saint-Gobain), Philippe Bourguignon (Club Med), Gilles Pélisson (Eurodisney)... Avec quinze clients, Alain Minc Conseil perçoit, en 1999, vingt millions de francs. 
 
[15] La filiation entre le club Jean Moulin et la fondation est clairement revendiquée par Roger Fauroux. 
 
[16] Laurent Vincent, Les Architectes du social-libéralisme. 
 
[17] Confédération française démocratique du travail, syndicat social-démocrate 
 
[18] Parmi les intellectuels signant la pétition de soutien aux propositions Notat, on trouve les saint-simoniens Jean-Baptiste de Foucault, Alain Touraine, Alain Finkielkraut, Jacques Julliard, Olivier Mongin, Pierre Rosanvallon, Daniel Lindenberg, André Wormser, Yves Linchtenberger... 
 
[19] Jean Drucker, Président de M6, Jean-Pierre Elkabbach d’Europe 1, Bernard Spitz de la direction de Canal +, Anne Sinclair, Christine Ockrent, entre autres, sont membres de la Fondation Saint-Simon. 
 
[20] Pierre Rosanvallon déclare : « Face à ceux qui nous accusaient par paresse de pensée unique, nous avons plutôt essayé de penser librement et ouvertement, en restant absolument indépendants de tous les pouvoirs (sic) ». Pierre Rosanvallon, « La Fondation Saint-Simon, une histoire accomplie », Le Monde, 23 juin 1999. 
 
[21] Les rapports entre Jacques Chirac et la Fondation Saint-Simon furent pourtant conflictuels, notamment durant la campagne présidentielle de 1995. Le 6 mars 1995, les saints-simoniens reçurent Jacques Chirac, « une rude altercation s’ensuivit » entre le candidat et Alain Minc qui soutenait Édouard Balladur. Cf. Weill Nicolas, « Les "saint-simoniens" tournent la page », Le Monde, Jeudi 24 Juin 1999.
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Site recommandé par Ousurfer.com

(c) andoar mirand - Créé à l'aide de Populus.
Modifié en dernier lieu le 27.01.2007
- Déjà 25926 visites sur ce site!